
Pour inaugurer la 2e saison du podcast DigiClub powered by Huawei, Ooredoo et BacPay, nous avons reçu Hatem Mestiri, CTIO d’Ooredoo Tunisie. Il a détaillé les raisons qui ont poussé l’opérateur à déployer un nouveau câble sous-marin en 2024, ainsi que les choix techniques nécessaires pour accompagner l’arrivée de la 5G et l’explosion de la consommation data dans le pays.
Un besoin vital de capacité bien avant la 5G
Selon Hatem Mestiri, Ooredoo ne pouvait pas se baser sur son câble co-géré avec Orange Tunisie, le câble Didon reliant la Tunisie à la Sicile. L’opérateur devait aussi varier ses routes vers l’international, sans dépendre exclusivement des alternatives fournies par l’opérateur historique, notamment le Sea-Me-We 4 entre Marseille et Bizerte.
“Attendre le câble Medusa, toujours retardé, aurait empêché Ooredoo d’absorber le trafic généré par la 5G”, explique le CTIO.
De ce fait, sans nouvelle capacité dès 2024, le lancement commercial de la 5G en février 2025 encourait des risques. Le câble Ifriquia, qui constitue la branche reliant Bizerte au système PEACE reliant l’Asie à l’Europe en passant par le Moyen-Orient et le bassin méditerranéen, a été posé en mars 2024 et mis en service en mai de la même année. Ce renforcement international était indispensable pour assurer la continuité et la qualité du service, surtout avant le lancement de la 5G qui a fait exploser les volumes de données.
La 5G impose une capacité internationale immédiate
La 5G multiplie la consommation de data. Un abonné 5G utilise en moyenne trois fois plus de volume qu’un abonné 4G. Cette montée en charge est automatique, car les plateformes vidéo adaptent la résolution dès que le réseau le permet.
“Si la capacité n’est pas prête le jour du lancement, c’est un tsunami qui vous surprend”, affirme Hatem Mestiri.
Pour garantir des débits élevés et éviter la saturation, Ooredoo devait donc sécuriser un nouveau chemin international avant même l’arrivée de la 5G sur le marché.
Un trafic international de 500 Gb/s, doublé grâce aux CDN
Le CTIO indique que le trafic international d’Ooredoo atteint environ 500 Gb/s. Grâce aux CDN installés dans son Data Center, le trafic réel traité dépasse 1 Tb/s.
“Environ 50 pour cent du contenu que consomment nos abonnés est déjà hébergé en Tunisie”, précise-t-il.
Les CDN de Google, Meta, Amazon et Akamai permettent de réduire la latence, de soulager les câbles internationaux et d’améliorer la fluidité sur les services vidéo et les réseaux sociaux. Cette architecture répond à une base de près de 5 millions d’abonnés data, complétée par une clientèle Fibre en forte croissance.
Une modernisation globale du réseau pour accompagner la 5G
La construction du câble Ifriquia n’était qu’une composante du chantier technique. L’opérateur a renouvelé son cœur de réseau, renforcé le transport national et augmenté régulièrement les capacités.
“Nous augmentons la capacité tous les trois ou quatre mois”, souligne le CTIO. Des équipes spécialisées surveillent en permanence les seuils de charge pour anticiper les besoins.
La Fibre joue également un rôle central. Le trafic global a bondi de 75 pour cent en un an, poussé par le streaming, le gaming et les usages simultanés au sein des foyers. Le xDSL est désormais en voie d’obsolescence au profit de débits de 50 et 100 Mb/s.
VoLTE depuis 2023 et préparation de la 5G SA
Ooredoo a lancé la VoLTE en novembre 2023, un service désormais utilisé par 20 pour cent de ses abonnés. Cette transition prépare la future voix sur 5G.
“Les réseaux 2G et 3G ferment déjà dans plusieurs pays. La VoLTE n’est plus une option”, rappelle Hatem Mestiri.
La Tunisie a lancé la 5G en mode NSA (Non Stand Alone, pour comprendre : 5G Non-Standalone et 5G Standalone, quelles différences ?). L’opérateur se prépare maintenant à basculer vers la 5G SA (Stand Alone), qui offrira une latence plus faible et une résilience supérieure, capable de supporter un million de connexions au kilomètre carré.
“Le NSA permettait de lancer vite. Le SA permettra de faire mieux”, résume-t-il.
Une 5G qui confirme l’importance de l’anticipation
Pour Hatem Mestiri, le moment le plus marquant reste le lancement de la 5G, rendu possible grâce à deux ans de préparation, y compris la pose du câble Ifriquia.
“Si vous attendez les annonces officielles pour vous préparer, il sera toujours trop tard”, conclut-il.
Avec une connectivité internationale renforcée, un réseau modernisé et une stratégie pensée à long terme, Ooredoo montre comment l’anticipation technique conditionne la réussite des technologies de nouvelle génération.
Cybersécurité et IA, deux défis majeurs
Notre invité s’est aussi exprimé sur l’importance de la cybersécurité, devenue critique. La résilience des réseaux est en effet un sujet hautement stratégique. Les pannes mondiales chez les clouds Amazon ou Microsoft montrent déjà la vulnérabilité des infrastructures.
Sur le sujet de l’IA, Hatem Mestiri souligne que l’IA transforme déjà les usages, y compris dans la manière dont Ooredoo gère son réseau en prévenant les pannes.
Il a également évoqué le partenariat avec NVIDIA et les serveurs installés dans le Data Center de l’opérateur.
“Le rythme de l’innovation est devenu incroyable. L’IA va transformer autant les opérateurs que les consommateurs”, estime-t-il.
Pour consulter l’intégralité de l’interview, rendez-vous sur YouTube pour la version vidéo et sur SoundCloud pour la version audio du podcast.
Walid Naffati