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Tunisie : Il y a 5 ans, nous avions Ammar 404…

Tunisie : Il y a 5 ans, nous avions Ammar 404…

Ce sont cinq ans qui se sont écoulés depuis la chute de Ben Ali en Tunisie, déjà. Mais on vous rassure dès maintenant. Dans cet article, on ne va pas adopter le discours (pseudo) populiste de quelques politiciens ‘’post-14 Janvier 2011’’ et on est loin de chercher à jouer la carte des révolutionnaires de la 25ème heure pour s’attirer la sympathie de quelques ONG afin d’avoir un financement.

Tunisie : Il y a 5 ans, nous avions Ammar 404…Ce sont cinq ans qui se sont écoulés depuis la chute de Ben Ali en Tunisie, déjà. Mais on vous rassure dès maintenant. Dans cet article, on ne va pas adopter le discours (pseudo) populiste de quelques politiciens ‘’post-14 Janvier 2011’’ et on est loin de chercher à jouer la carte des révolutionnaires de la 25ème heure pour s’attirer la sympathie de quelques ONG afin d’avoir un financement.

Mais une chose est claire. Cette chute du régime despotique de Zaba a eu le mérite de libérer le Net tunisien du joug de Ammar 404. Ce sobriquet donné à la machine de répression policière du temps de Ben Ali, était plus perverse que beaucoup le pensait. En façade, Ammar 404 était là pour censurer les sites dits «pornographiques et contre les valeurs de la société tunisienne conservatrice et musulmane». C’était, par ailleurs, l’argument avancé par le régime à chaque fois qu’il se faisait critiquer publiquement par ses opposants dans les séminaires à l’international.

Mais en réalité, cette machine servait à censurer les sites des opposants au régime et même les profils/pages facebook qui osaient critiquer ouvertement Ben Ali, à défaut de ne pouvoir censurer le réseau facebook en entier à cause de la pression en interne au palais (quelques membres de la famille de la femme de Ben Ali auraient été des fanatiques de facebook et ils auraient été les premiers insurgés contre la censure complète de Facebook en aout 2008). A l’époque, cette erreur monumentale a démocratisé encore plus facebook chez le grand public qui y trouvait le moyen alternatif à la propagande médiatique. De plus, même les non-initiés se sont mis à apprendre à utiliser les proxys comme HotSpot Shield. Ceci a compliqué les opérations de traçage des adresses IP des commentaires des profils les plus virulents contre le régime sur les réseaux sociaux. Ces proxy ont également pu donner accès aux Tunisiens la possibilité de lire les ‘exclusivités’ sur les dernières débâcles de Zaba et de sa famille sur les sites censurés, dont TuneZine du premier martyr du Net tunisien, Zouheir Yahyaoui (lire notre article).

Dans son discours du soir du 13 janvier 2011, suite au soulèvement populaire un peu partout en Tunisie, le président déchu a jugé qu’il était temps de lâcher du lest sur les libertés individuelles et a annoncé dans un discours diffusé à la télé qu’il n’y aura plus de censure. Les Tunisiens ont alors pu retrouver Youtube qui a été censuré quelques mois plus tôt à cause de vidéos parodiant lui et sa femme Leyla Ben Ali. Pourtant, la machine de la censure a continué à bloquer les sites dits «pornographiques» et… quelques sites d’oppositions. C’était, donc une ouverture de façade.

Le despote déchu, Zine El Abidine Ben Ali, lors de son discours du 13 janvier 2011 à la veille de sa fuite en Arabie Saoudite

Le despote déchu, Zine El Abidine Ben Ali (Zaba), lors de son discours du 13 janvier 2011 à la veille de sa fuite en Arabie Saoudite

Il fallait attendre le lendemain, le soir du 14 janvier 2011 -après que Zaba a été chassé avec sa famille vers l’Arabie Saoudite- pour que le Net tunisien se libère complètement de Ammar 404. C’était le tout premier résultat positif de la chute de Ben Ali, soit juste quelques heures après son départ. Et le reste, c’est de l’histoire…

Certes, il y a eu plusieurs tentatives de la part de personnes rapprochés du parti islamistes Ennahdha (qui a gouverné entre 2011 et 2015) de relancer une version barbue de Ammar 404 (contre les sites pornos) en essayant d’utiliser l’appareil judiciaire, en vain. Et c’est tant mieux d’ailleurs !

Alors pourquoi cet article ? C’est pour dire que s’il y a une richesse gagnée suite à la chute de Zaba, c’est justement cette liberté sur le Net. Il suffit d’aller dans d’autres pays arabes, comme les Emirats Unis, l’eldorado du Business au Moyen Orient, pour voir l’avantage que eux n’ont pas : Cet Internet Libre. Et non ! Ce n’est pas seulement une question de liberté pour consulter du porno (une hypocrisie sociale typique des sociétés arabo-musulmanes). C’est plutôt la question de le Net Neutrality. Ce concept dont les créateurs de valeur, les entrepreneurs et les multinationales ont besoin. Même le grand public en a besoin.

Faut-il rappeler à nos chers compatriotes qui appellent au retour de Zaba, que c’est grâce à la Net Neutrality que l’Instance Nationale des Télécommunications a pu bloquer la décision des 3 opérateurs à vouloir censurer Viber et les appels VoIP en général ? Faut-il rappeler à ces nostalgiques de Ben Ali, que si Ammar 404 était là, cette VoIP sera censurée par mesure de sécurité et qu’ils devait casquer plus cher en communication en ayant la peur au ventre de dire quelque chose de travers ? 

Faut-il rappeler à ces gens qui ont la mémoire courte que si le Ammar 404 de Zine El Abidine Ben Ali était là, ils n’auraient JAMAIS eu un prix d’appel aussi réduit comme c’est le cas maintenant ? Faut-il rappeler à ces nouveaux groupies de la dictature qui appellent au retour du despote et prêts à vendre leurs libertés contre un simili de tranquillité apparente, c’est grâce à cet Internet non censuré qu’ils arrivent à dénoncer les bavures sans avoir peur des représailles (exemple de la vidéo du policier ou de l’agent de la SONEDE) ?

Aujourd’hui, après la censure de la VoIP au Maroc, la Tunisie est le SEUL pays arabe à avoir un VRAI réseau Internet neutre et LIBRE. Une valeur que les multinationales et les hommes d’affaires, surtout dans les grandes entreprises TIC, cherchent désespérément. Au lieu de pleurnicher sur les querelles politiciennes, faites la pression sur le gouvernement pour qu’il renforce cet avantage et puis l’exploite cette richesse unique au monde arabe, qu’est le Net tunisien libre et sans censure, pour que la Tunisie devienne ce hub régional (arabe et africain) de l’économie numérique. A bon entendeur. 

Welid Naffati

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