L'actuTHD

Il n’y pas un problème d’emploi en Tunisie, mais plutôt un problème de profils

Il n’y pas un problème d’emploi en Tunisie, mais plutôt un problème de profiles

La Fédération Nationale des Technologies de l’Information et la Communication (Fédération des TIC, reliée au patronat tunisien) et l’EFE Tunisie (Education For Employment) Tunisie ont organisé jeudi 21 juillet dernier un Workshop à Tunis sur «Les métiers du digital».

Il n’y pas un problème d’emploi en Tunisie, mais plutôt un problème de profilesLa Fédération Nationale des Technologies de l’Information et la Communication (Fédération des TIC, reliée au patronat tunisien) et l’EFE Tunisie (Education For Employment) Tunisie ont organisé jeudi 21 juillet dernier un Workshop à Tunis sur «Les métiers du digital».

Une statistique édifiante a été révélée lors du premier Workshop par le modérateur Wassim Bel Arbi : 66% des profils qui se présentent à un entretien d’embauche ont des lacunes soit à l’écrit soit à l’oral. Ce problème de communication cache en fait un problème encore plus grand, que sont les soft skills. Ces qualités humaines et relationnelles qu’on apprend dans la vie de tous les jours ou dès l’enfance. Certes, les Hard skills, ces connaissances techniques qu’on apprend durant un cursus ou une formation professionnelle sont d’importance cruciale pour réussir son métier. Mais que faire quand on vit dans une période étrange où des métiers disparaissent à la célérité de la lumière à cause du numérique et de la robotique ? Il n’y a pas en effet d’autre solution que de s’y adapter en changeant carrément de métier et/ou d’apprendre de nouveaux Hard Skills. Mais le Soft Skills restera toujours une valeur sure qui ne changera pas.

«20 à 25% des tâches se font désormais via Tchat ou mail voire même sur les réseaux sociaux et non plus via le téléphone», a affirmé Olivier Bouchaud, directeur de TP Academy, une branche dédiée au recrutement et à la formation des téléconseillers du fameux call center Téléperformance. Pire encore : «L’anglais devient de plus en plus important au même titre que le français. Ce qui devient un handicap dans le recrutement des profils en Tunisie», a-t-il avoué.

Certes, il est toujours possible de faire une petite formation de mise à niveau, mais les employeurs se heurtent souvent à une résistance de la part des employés à changer de tâche ou de métier. «Je connais personnellement un jeune qui a changé de domaine par rapport à ce qu’il faisait avant. Maintenant il est directeur d’une entreprise de 30 salariés», a fait remarqué pour sa part Slim Jaidane, expert en Ressources Humaines. En gros, s’il y a blocage et risque de chômage, c’est dans la tête de la personne et non à cause de la  situation économique. 

Cette passivité humaine à ne pas vouloir apprendre de nouvelles technicités et surtout cette peur du changement en sortant de la zone de confort est un vrai casse-tête auxquelles doivent faire face les entreprises chaque jour. «On aura beau à mettre toute l’infrastructure, mais tant qu’il y a pas les bonnes ressources humaines, on réussira rien. Il nous faut une révolution culturelle dans le pays», s’est insurgé par la suite M. Jaidane. . «Sans les universités, les écoles mais aussi la famille qui est le noyaux dur de cette culture, on ne pourra jamais réussir cette révolution culturelle. Pis : Il faut se dire la vérité qu’on n’a plus la valeur du travail dans ce pays. Nous avons un problème d’adaptation à un évènement changeant avec des profils qui font de la résistance à tout».

Ce point a été partagé par Adel Torjmen de Sungad-FIS : «Sur 100 personnes en Tunisie, il y a 98 qui tchatchent (sur facebook, ndlr) et 2 qui travaillent. On n’a pas réellement un problème d’emplois disponibles, mais plutôt un problème à trouver les bons profils. Et je ne pense pas que ce soit les écoles et universités qui peuvent remédier à ce problème. Ce sont les entreprises elles mêmes qui peuvent trouver la solution. Il faut que l’Etat recule et laisse le privé faire ce travail de formation et de reconversion. Il faut que l’Etat trouve un cadre légal pour que le privé puisse faire ce travail librement sans la lenteur de l’administration». 

Tawfik Jelassi au Workshop de l'EFE et de la fédération des TIC

Tawfik Jelassi au Workshop de l’EFE et de la fédération des TIC

Pour Lamia Chaffai, présidente de EFE-Tunisie, les Soft Skills vont être une des pierres angulaires de l’éducation tunisiennes dès la rentrée prochaine : «Nous avons signé des partenariats avec plusieurs universités pour de l’apprentissage des Soft Skills grâce à des plateformes de e-learning. Elle permet aux jeunes étudiants de s’auto-évaluer et suivre des formations à distance. Nous préparons donc les jeunes avant qu’ils ne sortent sur le marché de l’emploi. C’est donc là notre premier axe sur lequel on va travailler à l’université. De plus, le ministère de l’Education organisera les 28 et 29 juillet prochains un séminaire où le ministre va annoncer l’intégration des Soft Skills dans l’enseignement secondaire».  

«La technologie évolue rapidement mais le secteur public ainsi que le privé montrent un certain blocage par rapport à ça. 500 entreprises ont disparus depuis l’année 2000 à cause du digital», a martelé pour sa part Tawfik Jelassi, ex ministre des TIC, de l’Enseignement supérieur et de l’Education nationale sous le gouvernement de Mehdi Jomaa. Des bruits de couloirs font échos d’une éventuelle intégration de M. Jelassi dans le prochain parti politique que compte lancer Mehdi Jomaa en septembre. 

«C’est donc devenu une question de vie ou de mort pour les entreprises déjà existantes. Tout le monde est concerné. De ce fait, on doit se demander quels sont les prochains métiers grâce au digital», a-t-il continué. «Cette transformation commence par une vision qui doit se transformer en stratégie pour finir par un plan d‘action. Un plan qui doit englober la relation avec le client pour les sociétés commerciales ou le citoyen pour le cas du e-gov. Ce ne sont donc pas avec les compétences des années 80 et 90 qu’on peut passer dans le futur. C’est pourquoi on parle plus de DSI mais de Chief Digital Officer. C’est un certain profil qui parle digital, qui pense digital qui doit penser en termes de stratégie et non d’outil ou de technologie. Il doit rapporter ses décisions au directeur, directement. On parle donc là d’une nouvelle culture de l’entreprise. Les structures et processus doivent changer à cause du digital. Quels nouveaux produits et quels nouveaux services qu’on peut lancer via le digital. Ce n’est pas tout simplement en rajoutant une simple couche IT qu’on peut espérer la réussite de l’entreprise. Si vous considérez que le digital est le plus danger qui la guette, c’est que vous n’avez rien compris et probablement vous n’avez pas votre place pour réussir. On ne peut pas avancer dans un nouvel écosystème avec les compétences du passé», a-t-il conclu.

Welid Naffati

Facebook Comments

Plus Populaires

To Top