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Réseaux programmables haute performance : Ericsson dessine l’après « best effort »


Dans un « position paper » publié récemment, l’équipementier suédois Ericsson plaide pour une bascule du secteur vers des réseaux (5G) capables d’ajuster, à la volée, la performance délivrée selon l’usage. Objectif : monétiser une « connectivité différenciée » et automatiser l’exploitation du réseau.

Un tournant : de la 5G « best effort » à la connectivité différenciée

Ericsson part d’un constat : l’approche « taille unique » qui a dominé les débuts de la 5G atteint ses limites. La prochaine étape consiste à proposer, non plus une simple bande passante, mais un niveau de performance adapté au service — cloud gaming, réalité augmentée immersive, IoT critique — avec un engagement sur le résultat. L’équipementier parle de « connectivité différenciée », nouveau terrain de valeur pour les opérateurs, rendu possible par des réseaux à la fois haute performance et programmables.

Trois leviers technologiques au cœur du modèle

Le document identifie un triptyque qui soutient cette mutation :

  • IA pour absorber la complexité, comprendre des objectifs (intents) et décider en temps réel ;
  • silicium avancé co-conçu avec le logiciel pour conjuguer puissance, efficience énergétique et compacité. A noter que le « silicium avancé » désigne des puces de dernière génération (procédés de gravure fins) co-conçues matériel/logiciel pour maximiser performance et efficacité énergétique ;
  • ouverture (interfaces ouvertes, cloud-native, rApps) pour accélérer l’innovation et le contrôle fin du réseau.

C’est la combinaison de ces leviers qui crée le terrain de jeu des réseaux programmables.

D’abord des réseaux « high-performing »

Avant d’orchestrer à la demande, il faut un socle qui tienne la charge : couverture, capacité, débits et latence doivent être au rendez-vous, partout et de manière efficiente. Ericsson y ajoute deux impératifs : sobriété énergétique et résilience/sécurité.

À titre d’indications, l’équipementier avance qu’un passage 4G→5G sur son système radio peut réduire d’environ 30 % la consommation tout en multipliant par dix la capacité ; ses dernières unités Massive MIMO visent jusqu’à 30 % d’économie d’énergie et 50 % de carbone incorporé en moins par rapport à la génération précédente.

Côté cœur, le basculement vers le 5G Standalone et un Cloud Core dual-mode est présenté comme un levier de réduction de coûts et d’énergie pouvant atteindre 20 %.

Sur la partie performance pure, le papier cite des briques comme Uplink Booster, Interference Sensing, Intelligent Cell Shaping ou encore la Carrier Aggregation avec Coverage Boost, et évoque un plan-utilisateur 5G capable d’atteindre des niveaux de ~20/10 Gb/s par utilisateur unique selon les cas d’usage. Il rappelle aussi, en s’appuyant sur ConsumerLab, que les opérateurs « quality-led » retiennent trois fois mieux leurs clients et sont près de deux fois plus susceptibles d’augmenter l’ARPU et les revenus mobiles d’au moins 1 % d’une année sur l’autre.

Programmabilité : de l’intent à l’action réseau

Le cœur de la démonstration réside dans la programmabilité : un réseau « comprend » un intent (par exemple « garantir une faible latence au jeu en nuage » ou « minimiser l’énergie en heures creuses ») et trouve seul la meilleure manière d’y parvenir, sans passer par des réglages manuels fastidieux. Pour cela, la service-awareness permet d’identifier le type de trafic (vidéo temps réel, FWA, MBB…) et d’aligner dynamiquement les ressources ; l’IA, distribuée (au site radio) ou centralisée (plateforme de M&O, rApps), orchestre et optimise en continu.

Et après : l’autonomie opérationnelle

La programmabilité ouvre la voie à des réseaux autonomes. Dans cette vision, l’exploitation bascule vers un mode « zero-touch », fondé sur des boucles fermées d’observation-décision-action et une gestion de bout en bout (RAN, transport, cœur). L’enjeu n’est pas seulement de tenir des SLA plus fins, mais aussi de scaler des milliers de services différenciés sans explosion des coûts d’exploitation.

Qu’en retenir côté opérateurs ?

Le message est clair : la valeur se déplace de la simple disponibilité de la 5G vers la capacité à piloter finement la performance selon l’usage, à l’exposer (APIs, SLA) et à automatiser l’ensemble. Les marchés où la concurrence se joue sur l’expérience — vidéo, jeu, usages professionnels critiques — seront les premiers bénéficiaires. Le chantier, lui, est transversal : modernisation radio, SA, rApps, IA opérationnelle, et culture d’ouverture.

Walid Naffati & IA

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