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Un chercheur tunisien à l’étranger est-il vraiment redevable à son pays malgré le peu de moyens ?

Un chercheur tunisien à l’étranger est-il vraiment redevable à son pays malgré le peu de moyens ?

«Ne me parlez pas de militantisme, il s’agit bien de votre pays. Aider et Rendre service à son pays étant un ingénieur tunisien est comme un service militaire que nous devons tous le faire». C’est ainsi que l’un des participants a interrompu le débat organisé mardi 5 août à l’hôtel Ramada Plaza à Gammarth. Il s’agissait du colloque annuel des compétences universitaires tunisiennes à l’étranger pour la participation de ces derniers dans la réforme du système national de la recherche scientifique et de l’innovation.

Un chercheur tunisien à l’étranger est-il vraiment redevable à son pays malgré le peu de moyens ?«Ne me parlez pas de militantisme, il s’agit bien de votre pays. Aider et Rendre service à son pays étant un ingénieur tunisien est comme un service militaire que nous devons tous le faire». C’est ainsi que l’un des participants a interrompu le débat organisé mardi 5 août à l’hôtel Ramada Plaza à Gammarth. Il s’agissait du colloque annuel des compétences universitaires tunisiennes à l’étranger pour la participation de ces derniers dans la réforme du système national de la recherche scientifique et de l’innovation.

Juste avant que Taoufik Jelassi, ministre des TIC, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, prenne la parole pour mettre le point sur son expérience personnelle et celles des membres du gouvernement : «Nous sommes partis à l’étranger grâce à des bourses nationales. Il s’agit donc avant tout d’une dette morale envers notre pays. Une dette à rembourser tôt ou tard». Le ministre a ainsi expliqué que son retour en Tunisie a été poussé d’abord par le remboursement de cette dette pour booster les réformes entrepris à l’échelle nationale. Et c’est autour des réformes de la recherche scientifique que le ministre a appelé les compétences universitaires à l’étranger à réagir lors de cette journée de travail.

Le ministre s’est chargé lui-même de l’animation de l’atelier. Il a passé la parole au Professeur Néjib Lazhari, directeur des programmes et du partenariat scientifique. Un état des lieux des programmes de recherche a été dressé pour l’occasion. Entre temps, le ministre n’a pas laissé les occasions passer sans intervenir pour enrichir la présentation du directeur des programmes par les dernières nouvelles et les avancements de son équipe ministérielle sur le sujet de partenariats internationaux.

Il a rappelé que des visites au Canada, au Japon et à la Corée du Sud seront prochainement sur son agenda pour signer plusieurs conventions partenariales avec les structures scientifiques et technologiques de ces pays. «Ces accords seront très bénéfiques aux chercheurs et aux structures de recherche locales», a-t-il insisté.

Ensuite, c’était le tour au professeur Chedly Souga pour prendre la parole afin de présenter un compte rendu des travaux du workshop des journées de Monastir (qui se sont déroulés du 20 au 22 Juillet 2014) et sont à porté sur les orientations de réforme de la recherche scientifique et de l’innovation.

Ces journées qui ont été organisés en collaboration avec le ministère de l’éducation et celui de la formation professionnelle. Selon le ministre, ces journées ne faisaient pas le point d’une couverture médiatique digne d’un tel atelier stratégique. Mais il a tout de même exprimé sa satisfaction de la qualité des rapports et des recommandations dudit séminaire. Les journées de Monastir venaient avec plusieurs recommandations qui vont de l’autonomie budgétaire des structures de recherches, jusqu’à la création d’instances de certifications et d’évaluation de la recherche.

Pour l’autonomie budgétaire, les chercheurs ont appelé à un contrôle en aval des dépenses au lieu d’un contrôle en amant mécanisé à travers le passage par le contrôleur des dépenses. Une procédure lourde qui accable les chercheurs et qui prolongent les délais impartis de leurs projets. Quant à l’évaluation de la recherche, un appel à l’instauration d’une culture de redevabilité devra être repensé. Qu’est ce qui motivera, en effet, un chercheur qui a évolué vers le grade de Professeur à continuer à produire ? 

Durant cette journée, trois ateliers parallèles ont pris place. Le premier s’intéressait à la consolidation des structures de recherche et le rôle des compétences tunisiennes à l’étranger. De ce cet atelier, une première recommandation a été faite à propos de la création d’une plateforme dédiée au rassemblement des compétences tunisiennes à l’étranger et leur mise en relation avec leurs homologues en Tunisie.

Taoufik Jelassi, ministre des TIC, modérant l'atelier

Taoufik Jelassi, ministre des TIC, modérant l’atelier

Encore un projet très bénéfique mais qui risque d’avoir le même sort de plusieurs autres projets ministériels, c’est à dire aux oubliettes, à cause de la bureaucratie (Appel d’offre pour la création de la plateforme, une validation du portail, une campagne d’incitation des compétences tunisiennes à s’inscrire sur cette dernière, etc.). Or, un simple groupe sur le réseau social des professionnels : Linkedin, pourrait faire l’affaire. Encore faut il rappeler qu’il faut saisir l’opportunité derrière la viralité des réseaux sociaux qui économisera un budget de communication pour faire connaitre ce portail ?

Dans ce même atelier, une autre question a été abordée : avec plus que 271 unités de recherches et plus de 14’000 chercheurs, pourquoi nous sommes toujours à une moyenne de 1.6 publications par publiant ? Pourquoi sommes-nous toujours insatisfaits de la recherche scientifique en Tunisie.

Certains ont justifié ceci par le manque de passion pour la recherche chez les jeunes doctorants. Ils ne s’y orientent que s’ils ont trouvé les portes du marché d’emploi fermé devant eux. D’autres ont fait porter la responsabilité aux enseignants chercheurs. Plusieurs d’entre eux n’entreprennent des activités de recherche que pour préparer leurs dossiers de passage de grade, dans l’objectif de bénéficier d’une augmentation de salaire, tout simplement. L’un des intervenants a rappelé : Les passionnés de recherche existent et on dispose de chercheurs turbo. Mais là c’est une tendance quasi générale qu’il faut absolument dynamiser. 

Le deuxième atelier a discuté la mobilité des enseignants et des chercheurs, de son importance dans le transfert de technologies et du savoir-faire. Or, cette mobilité sera aussi valorisante pour le chercheur lui-même. Les compétences tunisiennes à l’étranger présentes dans cet atelier se sont engagées à la fin de la discussion à faciliter la mise en place de ces conventions qui bénéficieront à la recherche scientifique en Tunisie.

Mais quand l’un des intervenants a fait remarqué que la mobilité des enseignants et des chercheurs est couteuse, Mustapha Mezghani, chargé de mission auprès du Ministre des TIC, a rebondi : «Oui, cette mobilité est couteuse. Mais la mobilité des footballeurs est encore plus couteuse. Nous agissons en terme de stratégie de consolidation de l’image d’un pays qui promeut les valeurs de l’innovation, de la recherche scientifique et de la création de valeur».

La mobilité vers les PMEs/PMIs étaient aussi à l’ordre du jour, un des professeurs tunisiens en Allemagne, a mentionné que dans le pays de Leibniz et Gauss, «on ne peut devenir professeur en université qu’après avoir pris un poste de responsabilité dans une entreprise du domaine. Ceci est un vrai remède au gap entre l’université et l’industrie» a-t-il fait remarqué.

Finalement le troisième atelier a soulevé la question de l’évaluation de la recherche en tant que vecteur d’application de la démarche qualité pour les structures de recherches dans le pays.

Il a été ainsi recommandé de créer un comité formé par les compétences tunisiennes à l’étranger pour évaluer les travaux de recherches dans le pays. Les intervenant dans cet atelier ont d’ailleurs  fortement encouragé la promotion de la culture entrepreneuriale auprès des jeunes doctorants pour qu’ils puissent convertir leurs projets de recherche en des modèles d’affaires rentables et commercialement viables.

Mais quand on évoque la transformation des projets de recherches en des startups compétitives, ne faut-il pas d’abord redéfinir l’arsenal juridique de la propriété intellectuelle par rapport aux structures de recherche ? La réforme des lois serait en plein chantier. Une contribution des compétences Universitaires à l’étranger a été surement bénéfique. 

Marwen Dhemaied

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