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Sajalni.tn : est-ce vraiment efficace contre la contrebande des téléphones mobiles ?

La plateforme Sajalni.tn développée par le Centre d’études et de recherche des télécommunications (Cert), est venue avec une grande promesse : limiter le vol et la contrebande des terminaux. En Tunisie, la moitié des terminaux actifs sur les réseaux des opérateurs téléphoniques proviennent du marché parallèle, a-t-on appris mercredi 23 décembre 2020, lors d’une journée d’information organisée par le Cert en partenariat avec le constructeur de téléphonie mobile chinois, OPPO.

Si l’on se tient aux dires du directeur du Cert, Naoufel Ben Saïed, Sajalni.tn va contribuer à la lutte contre le crime organisé et l’évasion fiscale, entre autres. La plateforme est, actuellement, à sa première phase d’implémentation. Cette période transitoire – durant laquelle tous les terminaux enregistrés automatiquement restent actifs – s’achève au 31 décembre. Le 1er janvier 2021, la plateforme entre en sa deuxième phase pendant laquelle tous les appareils issus de l’informel où signalés volés seront bloqués.

Ainsi, voler un téléphone mobile n’aura presque plus aucun intérêt pour l’auteur du crime à moins que son objectif ne soit autre qu’un gain d’argent facile. Grâce à Sajalni.tn, toute victime de braquage aura la possibilité de notifier le vol de son appareil à la police. Une fois ceci fait, le téléphone – étant identifiable grâce à l’International Mobile Equipment Identity (IMEI) et le numéro de série disponible sur la plateforme si, toutefois, il est enregistré – peut-être alors déconnecté des réseaux des opérateurs nationaux mais aussi internationaux. Le consommateur sera, de ce fait, relativement protégé contre le vol.

La plateforme Sajalni est jumelée à celle de l’Association des opérateurs et constructeurs de téléphonie mobile (GSMA), laquelle comporte, uniquement, une liste noire dédiée au signalement des terminaux volés. Nous noterons que la plateforme Sajalni contient, elle, trois listes : une blanche pour les téléphones mobiles et tablettes importés légalement et donc homologués par le Cert et autorisés à communiquer sur les réseaux de télécommunications ; une grise pour les mobiles et tablettes autorisés à communiquer communiquer jusqu’à la régularisation de leurs situations ; et une noire pour les téléphones bloqués et donc volés ou issus du marché parallèle.

Pour ce qui du marché parallèle, les commerçants du Moncef Bey et revendeurs de produits technologiques mal acquis, la plateforme du Cert devrait être d’un préjudice considérable. Les smartphones, portables et tablettes, vendus à des prix nettement inférieurs à ceux appliqués par les revendeurs officiels des marques disponibles en Tunisie – de par la TVA (18%) et les droits de douanes (25%) qu’ils ont à payer – ne seront plus opérationnels sur les réseaux de télécommunications. Ce qui fera moins de revenus pour les contrebandiers et revendeurs non agréés et sans doute davantage de recettes fiscales pour l’Etat. Étant obligé, dorénavant, à acheter son appareil certifié, homologué et en toute conformité auprès d’un revendeur agréé avec toutes les taxes comprises, l’utilisateur contribuera à renflouer les caisses de l’Etat. Nous noterons que le Cert a communiqué des chiffres effarants au sujet des téléphones issus de la contrebande. Pas moins de 60% des appareils actifs sur les réseaux téléphoniques proviennent de l’informel.

Il reste, toutefois, des interrogations, auxquels nous n’avons pas pu avoir de réponses satisfaisantes. Si l’on part du principe qu’aucun système n’est infaillible et que des failles à exploiter il y’en aura toujours, il demeure possible – théoriquement – de se procurer la liste des passagers d’un vol donné ou ceux qui transitent à travers les frontières terrestres et maritimes avec leurs numéros de passeports et d’enregistrer des appareils en leurs noms. Interpellé à ce sujet, le directeur général du Cert n’a pas pu avancer d’avis tranché. Il a toutefois affirmé que l’architecture de Sajalni était évolutive et la plateforme pourrait, de ce fait, être améliorée.

Notons que chaque voyageur aura la possibilité de ramener, depuis l’étranger, deux terminaux. C’est le quota que le Cert a fixé par arrivage ou voyage. Aucun plafond n’est, cependant, prévu pour le moment, selon le directeur du Cert.

Pour ce qui est de la sécurité de la plateforme, Naoufel Ben Saïd a nié les possibilités de piratage, en réponse à la question d’un intervenant. Ce qui ne peut que surprendre surtout que le risque zéro n’existe pas quand il s’agit de vulnérabilité des données. Pire encore, la lutte contre les cyber-menaces est devenue une tâche plus qu’ardue et le sera davantage avec l’arrivée de la 5G. Certes les solutions de cybersécurité sont de plus en plus efficaces mais les hackers sont aussi de plus en plus sophistiqués.

Nadya Jennene 

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